L'Empereur au Maréchal Davout
Berlin, 13 novembre 1806

Mon cousin, le maréchal Lannes sera le 15 à Thorn. Avancez-vous sur Gnesen, et envoyez un adjoint à Thorn pour savoir ce qui se passe. Pour peu qu'il y ait rien de sérieux, prévenez-en le prince Jérôme, et conseillez-lui de se rendre à Posen. Le maréchal Augereau a ordre de se rendre à Bromberg. Le major général vous fera connaître que je vous autorise à diriger sur Kowal la division Beaumont ; elle pourra envoyer quelques partis à Plock, et le général Milhaud pourra essayer de s'approcher de Varsovie. Il ne vous échappera pas que mon intention, en envoyant la division Beaumont à Kowal, est qu'elle soit à la portée de Thorn et de Varsovie, de manière que si les Russes se trouvaient en force entre Grodno et la Vistule, vous puissiez réunir tout ce qui serait sur Thorn. Tous mes renseignements sont que Russes ont rétrogradé quand ils ont su ce qui était arrivé aux Prussiens ; mais cela peut avoir changé. J'ai ordonné à la division Beker de se rendre à Thorn ; elle sera sous les ordres du maréchal Lannes comme elle a été précédemment sous vos ordres. Dirigez-la sur Thorn s'il elle n'en avait pas encore l'ordre. Il n'y a pas d'inconvénient que vous laissiez au général polonais les 40.000 francs trouvés à Posen, j'en ai mis 50.000 à votre disposition.
Voici la conduite à tenir avec les Polonais : du moment que vos 3.000 fusils seront arrivés à Posen, vous les remettrez au général Dombrowski, et vous lui direz qu'il peur lever six bataillons de jeunes gens, en choisissant le plus possible les officiers parmi ceux qui ont servi dans les légions polonaises et parmi les gens les plus considérables du pays.
... On m'avait d'abord annoncé des députés de Varsovie ; je ne les ai point vus. Sans écrire, faites part aux Polonais du mouvement que vous faites, et faites-leur dire que s'ils veulent s'insurger contre les Prussiens et désarmer la garnison de Varsovie, ils en sont les maîtres, que vous les soutiendrez avec votre cavalerie. Si Varsovie s'insurgeait, il serait bon d'y envoyer sur-le-champ le général Dombrowski pour organiser tout de suite les gardes nationales et armer les bataillons de jeunes gens. Si cet événement arrivait, vous pourrez faire soutenir les insurgés par la division Beaumont, celle du général Milhaud et même par celle du général Klein. Vous pouvez vous rapprocher de Varsovie, en vous tenant toujours cependant à portée de marcher sur Thorn, si les circonstances l'exigeaient. Il serait assez convenable, si les Polonais sont insurgés à Kalisz et à Posen, d'en envoyer un millier à la ville de Lenczyca, pour voir si la citadelle veut se rendre.
Vous voyez que je désire que vous ne passiez par la route de Kalisz, mais que vous vous rapprochiez le plus possible de la routz de Thorn. Donnez-moi quelques renseignements sur la nature du pays jusqu'à Varsovie et de Thorn à Grodno. Ne fatiguez point vos troupes par de fausses marches. Il n'y a dans tout ceci qu'une chose très-importante : c'est que mes trois corps et ma cavalerie puissent se réunir en peu de temps si les mouvements des Russes le rendaient nécéssaire...

retour à la correspondance de Davou