Davout à Son Altesse Impériale, le grand duc de Berg, etc. (3)
Jablonna, 17 décembre 1806
Monseigneur, l'ordonnateur du 3è corps m'a instruit que l'ordonnateur Pradel lui annonce que, par ordre de Votre Altesse, le 3è corps devra se pourvoir de vivres dans le pays où il est. J'ai eu l'honneur de mander à Votre Altesse qu'il n'offrait que peu ou point de ressources, et si cette décision est maintenue, j'ignore comment nous existerons.
Il n'est point dans mon caractère de forger des embarras et de faire des contes ; lorsque je fais connaître à Votre Altesse que chaque jour la misère des troupes augmente, cela n'est que trop vrai, et la mesure que l'on prend de nous refuser la viande à Varsovie va la porter à son comble si elle est maintenue. Le manque de viande oblige le soldat à manger tout ce qu'il trouve, et principalement du cochon, ce qui occasionne déjà le dévoiement, et vous n'ignorez pas, Monseigneur, que c'est le précurseur de la dyssenterie. Je demanderai en outre que, pour éviter les transports, on livrât aux régiments la viande sur pied.
L'ordonnateur me fait connaître aussi qu'il est décidé que la manutention de Praga servira exclusivement à la division Gazan. Il serait bien à désirer, cependant, que cette manutention, qui dans quarante-huit heures pourra fournir 30.000 rations par jour, s'il est alimentée de farine, fût affectée au 3è corps et à la cavalerie de Votre Altesse ; cela éviterait le passage du pont et l'entrée à Varsovie, où il nous reste, sous mille prétextes et quelques précautions que l'on prenne, beaucoup de monde de ceux qui vont aux distributions.
Il y a encore une réclamation à vous faire, c'est l'au-de-vie. Je prie Votre Altesse de se faire présenter les états de distribution ; elle y verra que le 3è corps y figure pour peu de choses. Aucune de mes demandes n'a obtenu de succès ; cependant il y a une division entière, celle du général Gudin, qui est au bivouac et occupée à des travaux de terre, pour lesquels les soldats ne sont point payés comme ceux de Praga, qui ont en outre l'eau-de-vie. Il serait donc de toute justice de l'accorder aux soldats de la division Gudin, outre que cela est nécessaire à leur santé.
Les divisions Morand et Friant ne sont cantonnées qu'en partie et dans des pays marécageux ; s'il y avait possibilité, je réclame aussi l'eau-de-vie pour ces troupes, ou au moins une demi-ration.
Ce serait, dans le premier cas, 22.000 rations d'eau-de-vie par jour, et dans le second, 14.000. Je prie Votre Altesse de donner ses ordres sur mes différentes demandes.
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