Davout à Son Altesse Impériale, le grand duc de Berg, etc. (4)
Jablonna, 17 décembre 1806

Monseigneur, le rapport du général Morand, que j'ai l'honneur de vous adresser, fera connaître à Votre Altesse qu'il est impossible de nous passer des distributions de Varsovie, même en viande. Ce que me dit Votre Altesse dans sa lettre d'aujourd'hui sur les ressources qu'elle a aperçues sur cette rive pourrait être vrai, s'il n'y avait pas si longtemps que nous y sommes si nombreux. Le fait est que si l'abandon où l'on nous laisse continue quelques jours, je ne sais ce que nous deviendrons. Si dans un pays comme la Pologne les aministrateurs dont Votre Altesse se sert ne sont pas assez habiles pour y trouver des boeufs, je ne sais à quoi on peut les employer.
Mon chef d'état-major vient de me donner connaissance de la lettre du général Belliard, qui annonce que la manutention de Praga doit servir au 3è corps ; je prie Votre Altesse de donner des ordres pour qu'on l'approvisionne de farines, afin que cette mesure ne soit pas illusoire.
Nous sommes aussi sans eau-de-vie ; je vous spplie, Monseigneur, de donner les ordres les plus impératifs pour qu'à tout prix il nous en procure. Toute la 3è division qui est sur la rive droite du Bug est au bivouac, et fait des retranchements considérables sans aucun salaire ; je demande seulement qu'on ne la laisse pas manquer d'eau-de-vie, même pour la santé du soldat.
J'ai reçu une lettre du prince de Neufchâtel, en date du 14 décembre ; il se plaint de ce que je ne lui ai pas adressé le doubles des rapports sur ce qui se passait au corps d'armée, et de tout ce que je savais sur les mouvements de l'ennemi. Il doit y avoir un malentendu, puisque vous m'avez donné l'assurance que vous lui adressiez les rapports originaux que je transmettais sur ce dernier article. J'ai l'honneur de vous prier, en conséquence, de vouloir bien me disculper sur cet obje. Quant au premier, à l'avenir, j'enverrai le double des rapports généraux, et même, pour ce qui concerne ce que je sais des mouvements de l'ennemi, je l'enverrai sous cachet volant, afin que vous puissiez en prendre connaissance, n'ayant pas le temps de faire des écritures.
Je vous adresse les rapports des généraux Milhaud, Petit et Gauthier. Votre Altesse verra que l'ennemi n'a point réussi dans son entreprise pour nous chasser de l'île.
Maintenant, on ne peut douter que l'ennemi ne soit en force entre la Narew et l'Ukra. Il est vraisemblable que, pour aller entre ces deux rivières, il y aura à faire plus qu'une forte reconnaissance.
J'ai fait connaître à Votre Altesse ce qui était nécessaire pour jeter un pont sur le Bug. Nous avons pris dans le pays tout ce qu'il y avait. La barque que vous avez vue à Jablonna a été mise à l'eau, quoique avec beaucoup de peine, et conduite à Okunin, où elle sert au pont volant. Si le général Hanicque n'arrive pas avec des moyens suffisants, il sera impossible d'établir un pont.
Il ne paraît pas que le général Lapisse ait été attaqué, du moins nous avons toujours été en communication avec celles de ses troupes qui sont à Modlin.

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