Davout au Major général de la grande armée, prince de Neufchatel, etc.
Wittenberg, 21 octobre 1806

Monseigneur, j'ai l'honneur d'adresser à Votre Altesse quatre lettres du prince de Wurtenberg à l'officier prussien qui commandait les troupes à Wittenberg. Ces lettres, qui ont été interceptées, prouvent que l'armée prussienne ne songe pas à couvrir Berlin, et que sa retraite est ordonnée sur l'Oder.
J'ai fait prendre au 3è corps les positions suivantes :
La 1ère division est placée en avant de Wittenberg ; maîtrisant les routes de Potsdam et de Belzig ; elle a en avant d'elle un parti de 100 chevaux pour éclairer ces deux routes. La 2è division a sa brigade de droite sur la route de Torgau, maîtrisant celles de Jessen et de Zahna ; cette brigade est couverte par le 2è régiment de chasseurs à cheval. La 2è brigade est sur la route de Koswich.
La 3è division est en réserve au village de Plata, sur la rive gauche de l'Elbe.
Je me fais éclairer par ma cavalerie sur le triangle qui se trouve vers Dessau, entre la Mulda et l'Elbe.
J'ai ordonné au général Vialannes de pousser une forte reconnaissance sur Potsdam.
En attendant les ordres de Votre Altesse, le corps d'armée prend ici quelques instants de repos dont il avait besoin pour rallier les hommes, que des marches longues dans un pays sablonneux avaient forcés de rester en arrière.
Il m'a été rendu compte qu'il existe sur l'Elbe des magasins considérables, notamment à Wittenberg et à Koswich. J'ai ordonné qu'on en prît possession et qu'on en fît constater l'état.
Le général Hanicque a reconnu à un quart de lieue de cette ville un magasin à poudre. D'après son rapport, il existe 300 milliers de poudre de bonne qualité et bien conservée.
L'équipage de pont a été arrêté par les sables ; il ne pourra guère arriver à Wittenberg que sous quelques heures. Je fais réunir tous les mariniers et pilotes du pays pour lui faire descendre l'Elbe jusqu'au point qu'il plaira à Votre Altesse de désigner. On fera suivre par terre les chevaux et les haquets.
J'ai l'honneur d'adresser à Votre Altesse le compte que m'a rendu le colonel du génie Touzard, sur l'état de la place de Wittenberg. J'ai ordonné à cet officier supérieur de faire tracer sur-le-champ, aux deux rives de l'Elbe, les ouvrages nécessaires pour mettre le pont de l'Elbe à l'abri d'un coup de main. Je l'ai autorisé à faire aux autorités du pays toutes demandes de pionniers, ouvriers et matériaux qui seront nécessaires. Je prie Votre Altesse de considérer qu'à la bataille du 14, quatre officiers du génie du corps d'armée ont été mis hors de combat, et que la compagnie de sapeurs a tellement souffert à cette même bataille, qu'il n'y reste que 36 hommes disponibles, parmi lesquels il ne se trouve aucun ouvrier d'art.
Je prie Votre Altesse d'envoyer à ce corps d'armée des officiers de génie, ainsi que des compagnies de mineurs et de sapeurs pour pouvoir suivre ces travaux.
Une reconnaissance du 12è régiment de chasseurs à cheval, envoyée sur Roslau, y est arrivée pendant la nuit et a trouvé les troupes de la division Suchet passant l'Elbe sur des nacelles.
Une autre reconnaissance du 1er régiment de chasseurs à cheval s'est emparée du pont de Torgau et en a confié la garde aux troupes saxonnes, avec la condition expresse d'en défendre le passage aux troupes prussiennes.

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