Davout au Premier Consul
3 pluviose an XII (23 janvier 1804)

Mon Général, le ministre de la marine n'a donné connaissance ni au contre-amiral Magon, ni à moi, des mesures qu'il avait adoptées pour une levée de matelots. Ce n'est que par une lettre du sous-commissaire de marine à Gand que j'ai appris qu'il avait donné l'ordre de lever tous les marins de ce quartier. Le ministre a très-certainement pris le plus mauvais de tous les moyens, et je vous garantis qu'il ne retirera pas de cette levée 50 matelots. Tous les commissaires de marine, tous les syndics feront de cette affaire une spéculation ; ils en retireront beaucoup d'argent, et ils ne trouveront point de matelots. Ce sont mille renseignements exacts que j'ai qui me donnent cette conviction.
Je me suis occupé tout de suite, mon Général, à remédier à tous ces inconvénients ; j'ai déterminé le contre-amiral Magon à aller avec mon chef d'état-major se concerter avec les préfets de l'Escaut, des Deux-Nèthes et de la Dyle pour opérer cette levée. Je ferai poster des détachements où on les jugera nécessaires.
J'ai remis au général Dumas les états des marins qui existent dans ces départements ; une pareille mesure sera prise dans celui de la Lys.
Je ne m'avance point, mon Général, en vous donnant l'assurance que nous aurons sous peu plus de marins qu'il nous en faudra pour le service d'Ostende. Tous les bâtiments de transport seront prêts du 15 au 20 du courant. Ils le sont déjà presque tous ; il n'en reste que très-peu à calfater. Encore à la rigueur auraient-ils pu s'en passer.
J'ai l'honneur de vous adresser, mon Général, une réclamation de la chambre de commerce d'Ostende sur une décision du ministre des finances qui veut que le prix des ventes des terres soit d'abord versé dans la caisse du receveur des domaines et de là dans la caisse municipale. Cette mesure est contre l'esprit de votre arrêté du 24 messidor, et il s'est maintenu, le prix des terres s'en ressentira. Il paraît que le préfet attend une réponse du ministre des finances, sur la réclamation de la chambre de commerce qui l'a communiqué, pour procéder à la vente des terres.
Je crois devoir, mon Général, vous faire passer des notes que je viens de recevoir sur l'esprit actuel du gouvernement hollandais. Elles sont dun adjudant général français au service de cette puissance. Tous les Français qui viennent de la Hollande, avec qui j'ai eu l'occasion de parler de ce pays, se sont tous accordés à donner de mauvaises intentions au gouvernement batave, et un très-bon esprit à ses armées de terre et de mer.
Avant son départ de Gand, le contre-amiral Magon m'a encore parlé du grand embarras où il se trouvait faute d'argent. Le 3 pluviôse il n'avait pas encore reçu un sol sur nivôse.
Le ministre de la guerre a donné l'ordre à différentes époques aux directeurs d'artillerie de Metz, Strasbourg, Mayence, Lille, Douai, Maestricht, La Fère et Mézières d'envoyer à Ostende pour mettre à la disposition de la marine des pièces d'artillerie et munitions. Presque aucun de ces objets n'est encore arrivé. J'en ai écrit à ces directeurs.

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