Davout au Premier Consul
5 brumaire an XII (28 octobre 1803)
Mon Général, j'ai l'honneur de vous adresser un mémoire et un plan sur le projet d'un fort à établir dans l'île de Cadzandt. Les motifs qui m'ont déterminé à faire faire les reconnaissances nécessaires se trouvent développés dans le mémoire. Je ne les répéterai point ici.
Le rapport ci-joint du général Serras
rend compte de l'échouage d'un corsaire français de Boulogne entre Gravelines et Calais. L'artillerie légère, la cavalerie et l'infanterie qui se sont portées sur l'Estran ont empêché l'ennemi d'emmener les bâtiments.
La batterie du musoir n'est pas totalement achevée. J'ai profité de la partie du plancher qui était faite pour mettre 3 pièces de 36 en batterie à 60 toises à l'est du musoir. Il y a une batterie de 3 mortiers et de 3 pièces forte et armée. Une autre à 600 toises plus loin sera de 9 mortiers et pièces qui seront en batterie dans quarante-huit heures. Elle se trouve précisément à la fin de l'Estran et à 500 toises : c'est par là que les Anglais sont venus lorsqu'ils ont bombardé Ostende il y a quelques années. J'ai fait établir aussi deux batteries à l'ouest du musoir, de 9 pièces chacune, qui seront également armées et achevées en deux jours : l'une à 600 métres du musoir, l'autre à 1200. Les 4 mortiers à grande portée sont arrivés de Strasbourg depuis quelques jours et ils sont en batterie. Le général Marmont connaît notre position et a dû vous en rendre compte ; il m'a promis deux compagnies de canonniers qui sont nécessaires pour servir toutes ces pièces.
Je voudrais, mon Général, vous rendre un compte aussi satisfaisant de la mienne. Cependant malgré que cela n'aille pas aussi vite que vous le désirez, il y règne une bien plus grande activité depuis quelques temps.
Nous aurons pour la fin du mois une trentaine de péniches et 42 corvettes ou chaloupes de grande pêche armées. Les corvette se trouvent à Dunkerque et à Nieuport.
La première division des écuries flottantes, au nombre de 27 bâtiments, sera prête dans une dizaine de jours.
On manquait d'ouvriers charpentiers et de calfats. J'ai envoyé un aide de camp dans différentes communes pour s'assurer s'il en existait : il en a déjà trouvé une trentaine de très-bons. Cela prouve la négligence que l'on avait apportée lors de la levée de ces ouvriers..
Les deux prames de Bruges et les deux prames d'Ostende seront achevées pour la fin de frimaire. Les trois de Gand l'auraient été aussi pour cette époque, sans la mesure que l'on vient de prendre de retirer tous les ouvriers charpentiers et cafats qui y travaillaient.
Les troupes s'exercent à toutes les manoeuvres et aux feux que vous avez ordonnés ; elles sont animées du meilleur esprit, et il y a peu de maladies.
J'attends avec bien de l'impatience les huit milles couvertures que le ministre Dejean nous annonce depuis bien longtemps. Mais elles ne sont ni à Saint-Omer, ni à Bruges, ni à Ostende. Elles existent seulement sur le papier ; on nous en a procuré d'un particulier d'Ostende 2000 ; mais il lui devient impossible d'en trouver d'autres. Le ministre Dejean, qui a approuvé ce marché, en ayant reculé les époques de payement, nous a ôté par ce moyen toute espèce de crédit à des ressources pour l'avenir.
Nous avons en vue dans ce moment-ci 5 bâtimenbts anglais, corvettes ou frégates ; ils sont mouillés à 3000 toises du port. J'attribue leur présence au rapport de quelques bâtiments neutres sortis hier d'Ostende, qui, ayant aperçu dans le port 9 corvettes de pêche, auront supposé qu'elles devaient sortir.
Votre ordre, mon Général, pour envoyer à Calais la 17è légère, aura son exécution sitôt qu'elle sera arrivée à Dunkerque.
retour à la correspondance de Davout
|