Davout à l'Empereur Napoléon 1er
19 thermidor an XIII (7 août 1805)

Depuis que Votre Majesté a déterminé qu'Ambleteuse serait le port de réunion du corps de droite et qu'elle m'a ordonné de le rassembler en suivant les mouvements de la flottille batave, j'ai dû porter un vif intérêt aux travaux du port, améliorer autant qu'il dépendra de moi leur perfectionnement, et chercher à bien connaître les moyens d'amélioration et de conservaion qui ont été proposés à Votre Majesté. Je la supplie dans ce moment où il paraît que le manque de fonds vient d'obliger le ministre d'ordonner la suppression de tous les travaux, de me permettre de mettre sous les yeux quelques observations sur les conséquences de cette suspension.
Je dois d'abord rappeler ici en peu de mots les travaux qui ont été exécutés depuis le mois de prairial, époque à laquelle l'abandon des travaux d'entretien ne permettait pas de recevoir à Ambleteuse des bateaux de première espèce.
Les déblais pour l'extension du bassin et pour mettre le port à la perfection nécessaire pour recevoir la flottille batave ont été terminés dans le commencement du mois dernier. On a continué depuis cette époque avec quelques tombereaux à enlever les alluvions que la mer ramène, et ces déblais servent journellement à remblayer le terre-plein du quai de l'ouest dont la charpente est terminée.
On a aussi réparé la brèche du quai en prolongement de la jetée du sud ; enfin on a abattu les pieux qui doivent servir de base à la charpente des prolongements des quais nord et sud du bassin, ainsi que ceux du fond provisoire de ce bassin.
Tel est sommairement l'exposé des ouvrages qu'on a exécutés depuis le mois de prairial.
Il est évident que si l'on n' achève pas les revêtements des quais du nord, du sud et du fond du port, les sables continueront de s'écouler sur ces talus, et il en coûtera alors beaucoup plus pour recreuser cette partie que l'on terminerait aujourd'hui pour une somme de 50.000 francs, les bois étant en grande partie approvisionnés, et toute la charpente du quai sud prête à poser.
L'achèvement du quai de l'ouest est extrêmement urgent pour le service des bateaux de première espèce qui s'y trouvent resserrés dans un petit esâce : les dégradations qui vont s'ensuivre augmenteront de beaucoup ma dépense.
Les améliorations les plus importantes réclamées par les ingénieurs et les marins sont :
1° Le prolongement de 80 toises de longueur du coffre en charpente de la jetée du sud ;
2° La construction d'un rempart sur la digue de Vauban jusqu'à la hauteur de la première batterie de la tour avec laquelle cet ouvrage se raccorderait en s'étendant jusqu'à la jetée du nord ; cet ouvrage, dont le but serait de préserver le port des sables qui l'encombrent du côté de l'ouest, aurait pu être exécuté à peu de frais par l'armée.
On n'évalue pas à plus de 50.000 francs pour les matériaux et la main d'oeuvre.
Enfin je dois dire à Votre Majesté qu'il est question de rendre à jamais utiles les dépenses qu'elle a déjà faites pour la création du port d'Ambleteuse, ou d'en perdre le fruit si d'ici à la mauvaise saison le ministre de la marine ne peut appliquer par mois spécialement aux travaux de ce port un fonds de 60.000 francs.
Je ne rappellerai point à Votre Majesté les travaux plus importants qui lui ont été proposés pour le port d'Ambleteuse, le projet de bassin à flot avec une nouvelle écluse qui mettrait ce port en état de recevoir des corvettes et mêmes des frégates. La beauté du chenal, la grande hauteur d'eau qui monte dans ce port, le calme du bassin pourront engager Votre Majesté à de nouveaux sacrifices, pour rendre commode et durable le port le plus sûr de toute la côte.

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