Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
18 juin 1806, Saint-Leu

J'ai fait tous mes adieux hier, mon cher Eugène. C'est un moment bien triste ; mais je cherche à m'étourdir en pensant que je reviendrai à Paris aussi tôt que toi. Je sais qu'on te prépare le pavillon de Flore. Ainsi ce ne sera peut-être pas long. Les fêtes sont décidément pour le mois d'août : ainsi je suis sûre de te voir bientôt et de passer quelque temps avec toi. J'ai bien besoin de penser que j'aurai du bonheur dans un mois pour supporter le chagrin présent.
L'Empereur a été bon pour moi, mais il ne sait peut-être pas combien je lui suis attachée, car il me semblait quitter mon propre père en le quittant. Il m'a permis de lui écrire souvent ; il parle toujours de toi avec plaisir. Ainsi, mon cher Eugène, ne sois pas triste. Aime ta femme bien tendrement ; il vaut bien mieux qu'elle ne soit grosse qu'après ton voyage en France.
Je pars demain. je quitte la France ; je sens malgré cela que je serai toujours Française.
Quelle destinée est la nôtre ! N'importe, remplissons-la avec courage, et que notre attachement nous console des grandeurs.

Hortense

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