Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
8 décembre 1807, Paris

Je suis un peu souffrante, mon cher Eugène, je crois que c'est un commencement de grossesse. Ce sera un bien pour moi, puisque cela me forcera à prendre un peu plus d'intérêt à moi, mais cela ne pourra jamais me faire oublier mon pauvre enfant ; si jeune il m'aimait déjà tant, que je m'en voudrais même de ne pas y penser toute ma vie.
Je ne puis assez te dire combien l'Empereur a été bon pour moi ; je t'assure que je sens bien que si je pouvais rester quelque temps tranquille à Saint-Cloud, je me trouverais beaucoup mieux ; les petits soins qu'il a la bonté de prendre quelquefois pour me distraire me touchent plus que je ne peux t'exprimer et je m'aperçois bien que, malgré l'absence, l'Empereur sait toujours distinguer les personnes qui lui sont véritablement attachées ; ainsi, sois bien persuadé que s'il ne te fait pas venir, ce ne peut être que parce qu'il a besoin de toi là-bas.
Le prince Jérôme a été très aimable pour moi ; le prince et la princesse Murat ont été un peu plus froids ; on m'a répété plusieurs choses qu'ils ont dites de moi qui sont si mal que j'ai de la peine à le croire. J'avoue que je ne croyais pas que ma position et mes malheurs puissent faire envie.
Adieu, mon cher Eugène, c'est notre attachement qu'on doit envier et notre contentement intérieur qui vient de n'avoir jamais rien fait de mal. J'embrasse ma soeur et ta petite fille.

Hortense

retour à la correspondance d'Hortense