année 1849
10 décembre 1849

Fête de l'Hôtel de ville

Le préfet de la Seine donne à l'occasion de l'anniversaire du 10 décembre une fête dans les salons de l'hôtel de ville. Le Président de la République y assiste et répond en ces termes au toast du Préfet :

Messieurs,

Je remercie le Corps municipal de m'avoir invité à l'hôtel de ville et d'avoir fait distribuer, aujourd'hui même, de nombreux secours aux indigents. Soulager l'infortune était à mes yeux la meilleure manière de célébrer le 10 décembre.
Je ne viens pas récapituler ici ce que nous avons fait depuis un an. Mais la seule chose dont je m'enorgueillisse, c'est d'avoir, grâce aux hommes qui m'ont entouré et qui m'entourent encore, maintenu la légalité intacte et la tranquillité sans collision.
L'année qui commencera sera, je l'espère, plus fertile encore en heureux résultats, surtout si, comme l'a dit M. le Préfet de la Seine, tous les grands pouvoirs restent intimement unis. J'appelle grands pouvoirs ceux élus par le peuple : l'Assemblée et le Président. Oui, j'ai foi dans leur union féconde ; nous marcherons au lieu de rester immobiles : car ce qui donne une force irrésistible, même au mortel le plus humble, c'est d'avoir devant lui un grand but à atteindre et derrière une grande cause à défendre.
Pour nous, cette cause, c'est celle de la civilisation tout entière.
C'est la cause de cette sage et sainte liberté qui tous les jours se trouve de plus en plus menacée par les excès qui la profanent.
C'est la cause des classes laborieuses, dont le bien-être est sans cesse compromis par ces théories insensées qui, soulevant les passions les plus brutales et les craintes les plus légitimes, feraient haïr jusqu'à la pensée même des améliorations.
C'est la cause du gouvernement représentatif, qui perd son prestige sanitaire par l'acrimonie du langage et les lenteurs apportées à l'adoption des mesures les plus utiles.
C'est la cause de la grandeur et de l'indépendance de la France ; car, si les idées qui nous combattent pouvaient triompher, elles détruiraient nos finances, notre armée, notre crédit, notre prépondérance, tout en nous forçant à déclarer la guerre à l'Europe entière.
Aussi, jamais cause n'a été plus juste, plus patriotique, plus sacrée que la nôtre.
Quant au but, que nous avons à atteindre, il est tout aussi noblle que la cause. Ce n'est pas la copie mesquine d'un passé quelconque qu'il s'agit de refaire, mais il s'agit de convier tous les hommes de coeur et d'intelligence à consolider quelque chose de plus grand qu'une charte, de plus durable qu'une dynastie : les principes éternels de religion et de morale en même temps que les règles nouvelles d'une saine politique.
La ville de Paris, si intelligente, et qui ne veut se souvenir des agitations révolutionnaires que pour les conjurer, comprendra une marche qui, en suivant le sentier étroit tracé par la Constitution, permette d'envisager un vaste horizon d'espérance et de sécurité.
On a dit souvent que, lorsqu'on parle honneur, il y avait écho en France. Espérons que, lorsqu'on y parle raison, on trouvera un retentissement égal dans les esprits comme dans les coeurs des hommes dévoués avant tout à leur pays.
Je propose un toast à la ville de Paris et au Corps municipal.

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