Bonn, le 14 avril 1865
Lettre du professeur F. Ritschl au sujet de "La Vie de César"

Sire,

Votre Majesté Impériale a daigné m'accorder gracieusement un exemplaire de luxe de l'Histoire de Jules César. Si le portrait idéal du plus grand Romain ajoute à la valeur d'un tel présent, la dédicace autographe de Votre Majesté le rend inappréciable. Que Votre Majesté veille bien agréer pour cette distinction honorifique l'expression de ma reconnaissance la plus profonde et la plus respectueuse !
Je prie en même temps Votre Majesté de me faire la grâce d'accepter en retour un exemplaire de la traduction allemande. Le traducteur a cru travailler dans l'esprit de Votre Majesté, en s'étudiant à éviter toute recherche de l'élégance légère qui caractérise le style des feuilletons modernes, à rendre la simplicité et la concision antiques de l'original, et à reproduire sa période architectonique et ses couleurs sévères. Le traducteur était en cela guidé par la conviction qu'il importait avant tout d'arriver à une ressemblance parfaite, où se reflèterait la haute individualité de l'auteur, aussi grand penseur que grand écrivain ; il s'agissait d'ailleurs d'un ouvrage qui n'était pas écrit pour l'amusement frivole du moment, mais qui était destiné à exercer et qui exercera nécessairement son influence sur l'éducation historique et politique de plusieurs lustres. Si l'on osait se flatter d'avoir ainsi répondu aux intentions élevées de Votre Majesté, on y trouverait la plus enviée de toutes les récompenses.
L'année dernière, j'ai pris la liberté de soumettre très-humblement à Votre Majesté, au nom de la Société, la trente-sixième livraison des Annales publiées ici par la Société des Antiquaires rhénans. Comme Votre Majesté n'a pas repoussé ce témoignage du plus profond respect, j'y puise l'audace de demander à Votre Majesté la grâce d'accepter aussi les livraisons suivantes, la trente-septième et la trente-huitième, celle-ci publiée en ce moment même. Si Votre Majesté ne juge pas indignes de sa haute attention les tableaux synoptiques de la mosaïque romaine de Nennig, la Société sera peut-être autorisée à se flatter de l'espoir d'oser envoyer également, après leur achèvement, les feuilles coloriées dans la grandeur de l'original, qui sont actuellement sous presse.
Enhardi par la bienveillance indulgente de Votre Majesté, j'ose enfin solliciter d'Elle un accueil gracieux pour quelques petits travaux de moi-même, et je m'estimerais heureux de gagner à mon opinion sur les tessères des gladiateurs l'approbation d'un connaisseur de l'antiquité romaine tel que Votre Majesté.
Je reste avec le plus profond respect, Sire, de Votre Majesté impériale, le plus humble serviteur.

Friedrich Ritschl

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