Paris, dimanche 20 avril 1851 Charles de Flahaut à sa femme
"Broglie a grandement rendu service en formant le cabinet actuel ."
* Le coup du 2 décembre (Henri Guillemin / Gallimard / p.274) Merci pour vos deux lettres dont j'ai reçu l'une à Bruxelles, l'autre ici... En attendant, ils déclarent que la seule chose à faire est de maintenir l'état de choses actuel et qu'il faut déployer tous les efforts pour proroger les pouvoirs du Président : ils sont prêts à le faire. Toutefois, ils reconnaissent qu'on ne peut agir dans ce sens en usant des seules voies légales, mais bien par un coup d'Etat de l'Assemblée. Comment cela finira-t-il - étant donné que Thiers, les Orléanistes purs, la Montagne et le parti Cavaignac s'y opposent - je renonce à le cmprendre. J'ai vu Broglie, qui est l'homme le plus honnête de France. Il a grandement rendu service en formant le cabinet actuel. Il m'a prié de le rappeler à votre souvenir et à celui d'Emilie, et par elle au souvenir de Lord L. (Lansdowne). rendez-vous compte de mon activité. Je suis passé hier m'inscrire d'abord chez le Président ; j'ai été ensuite chez Mmes de Noailles et de Girardin, chez Carbonel, Guizot, Mmes de Lobau, de Massa, de Caraman, Duchâtel et Richard Metternich. Je vous écris ces noms pêle-mêle, car je ne les ai pas trouvés à domicile, et pour les séparer des personnes que j'ai vues, c'est-à-dire Mme de Liéven, qui m'a reçu à bras ouverts, mais est furieuse que j'aie décliné ses soirées des dimanches. Sur place, j'ai vu également Lady Sandwich. Ensuite j'ai été chez Broglie, avec qui j'ai eu une bonne longue conversation. Guizot, je l'ai rencontré chez Mme de L[iéven]. Le soir, je me suis rendu à Passy, où je n'ai trouvé personne sauf la famille de Rémusat ; ce dernier m'a paru quelque peu timide. J'y dîne ce soir, demain chez Lady Sandwich, mercredi chez Mme de Liéven avec Changarnier, Broglie, Duchâtel et G. (Il s'agit de Guizot dont la princesse de Liéven avait été l'Egérie). Le pauvre Exelmans a été à la gare pour me joindre, mais il était trop tard ; il est passé chez moi vendredi soir. Maintenant qu'il a son bâton (On lui avait conféré la dignité de maréchal de France en 1849), le voilà tout rajeuni. Après vous avoir donné un récit détaillé de cette activité, je dois ajouter qu'elle m'est tout à fait odieuse ; mais on s'étonnerait de me savoir venu à Paris pour passer mes journées chez moi en robe de chambre. Pourtant si je restais à la maison j'aurais la compagnie d'Auguste, car il est patraque ; depuis mon arrivée, il n'est pas sorti de sa chambre et guère de son lit.
* Le secret du coup d'Etat (Guedalla-Kerry / Emile-Paul 1928 /p.125 à 128) Voir d'autres pages numérisées sur ce sujet
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