Lettres d'Adélaïde de Souza à Charles de Flahaut, son fils
(CHAN 565 AP 9)
17 avril 1817

Comme tu l'avais deviné, M. d'Os... a répondu cent mensonges , entre autres que ce n'était pas lui qui avait demandé au corps diplomatique de ne pas te recevoir, que c'était le grand duc qui avait exprimé la volonté de ne pas te rencontrer, et que même lorsqu'on t'avait présenté à lui, il avait dit : Ce n'est pas Flahault qu'on doit le nommer, c'est fléaux ; que tu allais partout tenir des propos infâmes sur le Roi etc... Si tu avais écrit au duc de R. et M. de C. quand et comme je te l'avais demandé, cela n'aurait fait aucune impression. Tout ceci est un secret confié par Mme Narischin et que tu ne dois pas savoir. Cela lui ferait une tracasserie. Si tu écris à M. de R. et à M. de C, envoie-moi tes lettres, et qu'elles soient comme je te les ai demandées. Je n'ai pas la prétention de juger ta position en Angleterre, ne vois pas non plus de la juger mieux que moi ce qu'il faut ici. N'entre pas dans ces détails, méprise cette conduite, . Si M. d'Osmont veut te faire politesse, reçois-la parce qu'il est ton ambassadeur et que tu ne dois pas savoir ce qu'il a répondu. Il a craint d'être blâmé et il a menti. Qu'il y-a-t-il de surprenant à cela ? de sa part. ce qu'il faut, c'est prouver ici le mensonge et je m'en charge.
Je suis bien touchée de ce que Mlle ... t'a chargé de me dire, que j'aime la personne dont le caractère si noble, si élevé, si généreux, te promet tant de bonheur, et comme je mourrai tranquille lorsqu'à ma dernière heure mes yeux se porteront vers elle pour lui confier mon Charles et pour être sûre que son affection remplacera la mienne. Enfin, je me dis sans crainte aujourd'hui : Je puis mourir. Du reste, pour son repos comme pour le tien, si le mariage doit avoir lieu, qu'il soit le plus prochain possible. Tant qu'on espérera l'empêcher , on y travaillera par les plus basses intrigues ; c'est elle, c'est toi, c'est moi qu'on attaque ici, et lorsque cela sera fait on l'approuvera, parce qu'on approuve tout succès. Parce que j'ai vu les mêmes abominations lorsqu'il a été question de mon mariage.
Adieu, Monsieur Auguste Charles Joseph de Flahault de la Billarderie, né le 21 avril 1785. La loi est positive ici ; ton mariage (s'il a lieu) fait suivant les lois anglaises suffit et est valide ici.
(Le texte de la loi est : que tout mariage fait en pays étranger est valide ici ; lorsqu'il est fait suivant les lois du pays où l'on se trouve.)
Quant à la cérémonie catholique, la chapelle catholique à Londres, ou même celle de Palmella suffirait aussi. J'aimerais mieux la première. Mais en présentant le passeport que tu as reçu, tu pourrais te faire marier par l'ambassadeur de France. Car il faut bien distinguer l'homme que tu méprises de l'ambassadeur qui est là pour faire les affaires quand tu es en règle.
Adieu, cher et bien cher ami, je t'aime de toutes les forces de mon âme, je n'existe que pour toi, et tous ces mensonges, toutes ces calomnies me dégoûtent de la vie au point que j'en ai le mal de mer quand je songe qu'il faut avoir un lendemain à chaque jour ! Que je déteste la bassesse des heureux d'aujourd'hui. Le Roi ignore le mal qu'ils font et M. d'Os... le sait bien mal

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