M. de Vaudreuil au comte d'Artois
Venise, 2 août 1790
- n° 49

M. et Mme de Vaudreuil ont attendu cette époque avant de se décider à partir, Monseigneur. Mais il ne leur est plus possible de retarder leur départ. Mme de Vaudreuil est appelée par toute sa famille, de laquelle elle est séparée depuis un an, et son mari est obligé de faire une apparition pour l'arrangement de ses affaires et de celles de sa mère, que les décrets de l'abominable Assemblée ont réduite à la mendicité en détruisant ses pensions, la récompense de soixante et quinze ans de services de son mari, et son douaire sans lequel elle ne se serait pas mariée. Elle quitte sa maison pour aller vivre dans une chaumière, et M. et Mme de Vaudreuil qui logeaient avec elle, ruinés eux-mêmes, ne peuvent garder cette maison, et il faut bien qu'ils prennent tous d'accord un parti relatif à leur position. Mais Vaudreuil ne restera dans cette abominable ville que le temps nécessaire et se hâtera de venir vous rejoindre avant peu.
J'espère que vous le chargerez de vos commissions ; il s'en acquittera avec zèle. Mes amis ont chargé sa femme de lettres pour la Reine. Je puis vous répondre qu'il est dans des principes invariables de fidélité pour la monarchie et de dévouement et de reconnaissance pour vous, et qu'il brûle du désir de les prouver. Sans cela, je ne prendrais pas la liberté de vous l'adresser, et je le renierais avec indignation.
Leur départ m'afflige, mais il m'a été impossible de ne pas céder à la position cruelle de leur mère, à laquelle ils vont porter quelques secours.
Recevez, Monseigneur, mon tendre et respectueux hommage.

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