Lettres du commandant Coudreux à son frère (1804-1815)

Lunebourg, 12 décembre 1806

Depuis quinze jours, mon cher ami, nous trottons comme des enragés dans le plus mauvais pays de l'Europe. Nous nous rendons à grandes journées au quartier général du maréchal Mortier, qui est maintenant à Schwerin : on dit que nous allons en Pologne.
Jamais de ma vie je n'ai jamais rien vu d'affreux comme la Westphalie. Pas une ville passable ; pas une grande route ; pas un pont de pierre. Nous couchons tous les soirs dans de mauvais hameaux, ou en bivouac, et nous sommes fort heureux quand nous pouvons trouver un morceau de pain et un verre de schnick. Enfin, vaille que vaille, je me porte bien et c'est le principal.
Nous avons pris beaucoup de Prussiens qui s'étaient échappés à Hameln et à Nienbourg. Ces messieurs-là ne sont pas aussi méchants qu'on voulait bien le dire l'an passé. Il est probable que nous nous battrons incessamment avec les Russes. En attendant je marche, je fume ma pipe, et je te souhaite une bonne santé.
La saison n'est pas encore très rigoureuse ; nous n'avons pas encore vu de neige. En revanche, il pleut tous les jours, les rivières sont débordées partout, et nous sommes tous les jours dans la boue ou dans l'eau jusqu'à moitié jambes. Si cela continue, nos voltigeurs n'arriveront jamais à Schwerin.
Adieu. Tout à toi.
Ton sincère ami.

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