Lettres du commandant Coudreux à son frère (1804-1815)

Paris, 24 janvier 1815

Je t'annonçais, mon ami, par ma lettre du 18, que mon régiment partait le 23 pour Besançon et que j'avais obtenu l'ordre de le suivre : rien au monde ne paraissait plus sûr que mon affaire, et cependant, depuis le 18, j'ai changé trois fois de destination. Le 19, j'étais à la demi-solde ; le 22, j'étais conservé avec la solde entière et à la disposition de M. le gouverneur de Paris ; aujourd'hui, je suis à la suite du 4è régiment d'infanterie légère, jouissant de ma solde d'activité, et espérant un bataillon d'ici à peu de temps. Mais puis-je bien compter sur de pareilles promesses ? Depuis mon retour de Russie, voilà la deuxième fois que je suis mis à la demi-solde et que j'ai le bonheur de me raccrocher aux branches ! L'ordre que j'ai porté ce matin à M. le colonel du 4è est cependant aussi formel que je puisse le désirer. Mais comme on défait souvent le soir ce qu'on aait fait le matin ; mais comme, avec tous les droits du monde, on n'est pas toujours sûr d'avoir raison ; mais comme, enfin, je pourrais ajouter encore cinquante mais les uns au bout des autres sans manquer d'étoffe pour les appuyer, je prends ce qu'on me donne, et j'attends le plus patiemment possible que le temps décide de mon sort.
Adieu, mon ami. Ton crédit sur Besançon devient inutile ; je t'en remercie donc infiniment. Je t'écrirai d'ici deux à trois jours comment j'aurai été reçu au 4è. Le colonel Brice et tous mes anciens camarades du 15è m'ont comblé en partant de compliments et de protestations d'amitié.

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