Lettres du commandant Coudreux à son frère (1804-1815)

Paris, 4 juin 1815

La fête du 1er juin était magnifique. Napoléon a été proclamé encore une fois Empereur des Français par les députés du peuple et de l'armée. La cérémonie de la distribution des aigles a été imposante ; l'Empereur a prononcé tous les discours que tu verras dans les gazettes, avec une force et une chaleur que nous ne lui avions jamais vues. On a pu entendre les acclamations unanimes de plus de 200.000 âmes qui couvraient le Champ de Mars. Jamais peut-être, depuis quinze ans, l'Empereur n'avait inspiré plus de dévouement et plus de confiance, en même temps qu'il ne s'était jamais montré plus accessible.
J'ai vu au Champ de Mai M. Ramond, mon nouveau colonel ; je lui ai fait avant-hier ma visite de cérémonie. Nous nous sommes quittés fort contents l'un de l'autre, et j'augure très bien pour l'avenir de la politesse avec laquelle il m'a reçu. C'est un homme de quarante ans environ ; il sort de la Garde impériale. Il m'a paru avoir tout à fait le ton et les manières de la bonne compagnie. Je suis destiné à commander le quatrième bataillon qui n'est pas encore complet, de manière que j'aurai le temps de m'organiser comme il faut avant de partir pour l'armée. J'espère me mettre après-demain en uniforme de la ligne.
J'ai aussi rencontré au Champ de Mai un officier de dragons nommé de Lamarre, qui m'a pris pour toi, et qui ne pouvait pas revenir de te voir en uniforme de lieutenant-colonel d'infanterie-légère. Il m'a chargé de te faire des compliments. Il espère te voir incessamment.

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